Société anthroposophique en France

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Défendre l'anthropo­sophie et Rudolf Steiner

A l’heure où l’anthroposophie et Rudolf Steiner semblent bien être des sujets vendeurs pour les médias, ceux qui connaissent le sujet et le travaillent sérieusement ont de bonnes raisons de s’offusquer de la mauvaise foi des détracteurs. L’expérience montre que les correctifs à de fausses affirmations n’ont pratiquement aucun effet. Les recherches historiques documentées, les études étayées et référencées, les démonstrations par les preuves sur le terrain n’ont aucune valeur aux yeux de ceux qui affirment que, de toute façon, le fond est mauvais et que même si on ne trouve rien de répréhensible, cela prouve bien que le mal présupposé est vraiment insidieux et diaboliquement dissimulé. On trouve ici la limite des argumentaires dans ce genre d’agression. Quantitativement, la multitude d’acteurs sur le terrain qui témoignent et s’inscrivent en faux contre les mensonges, ne pèse rien face à un seul et prétendu « lanceur d’alerte ». Mieux encore : les journalistes dits d’investigation lui vouent immanquablement une foi aveugle, en dépit des signes inquiétants qui, à la première lecture, devraient éveiller leurs soupçons.

Où se situe alors le véritable combat ? Puisqu’après tout, les situations humaines sont compliquées, souvent problématiques. Des égarements d’individus isolés sous l’influence du nazisme : malheureusement oui, et il faut le dénoncer sans nuances. Des propos discutables de Steiner dans des contextes improbables, il s’en trouve : à vérifier et si nécessaire, les réprouver.  Des références à des concepts datés de la théosophie du début du 20e siècle : à ne pas prendre à la lettre, s’en distancier quand elles sont irrecevables. Des détournements d’idéaux pour justifier des égarements ou servir des ambitions personnelles : oui, à l’évidence : cela a existé et peut encore se trouver. Faut-il pour autant condamner la vision initiale qui a été dévoyée ?

Défendre l’anthroposophie ne pourrait  en aucune manière signifier prendre parti pour un groupe humain désigné comme : «  les anthroposophes ». Une définition pour un tel groupe, si elle ne veut pas être fantasmée, reste encore à construire. A l’évidence, l’histoire parfois rugueuse de la Société et du mouvement anthroposophique  révèle l’hétérogénéité de ceux qui s’en réclament. Défendre l’anthroposophie, peut-être ; mais alors, pas seulement en la présentant comme une conviction profonde – donc indiscutable, partagée ou pas. Il faudrait un vrai débat d’idées. Sur le thème récurrent de la pseudo-scientificité, on trouve vite les jugements a priori, crispés sur une posture idéologique. Redisons-le : il existe des études sérieuses de type universitaire qui permettent de situer l’originalité de Steiner dans l’histoire de la pensée. Cette recherche ouvre un champ de questionnements loin d’être achevé. Elle est évidemment ardue, exigeante– c’est ce qui fait la différence avec les polémiques et leurs gesticulations. Ceux qui s’y engagent en chercheurs véritables sont les bienvenus. Cependant, la dignité de l’exercice requiert un minimum de règles fondamentales : l’utilisation d’argumentaires qui respectent le champ du questionnement. Autrement dit : les coups au-dessous de la ceinture sont non seulement irrecevables, mails ils révèlent les limites ou la mauvaise foi du protagoniste.

Défendre Rudolf Steiner, ce serait défendre qui, quoi, quand… ? Lui-même, en tant que chercheur, n’a cessé de tâtonner, d’évoluer dans ses formulations, et, de son propre aveu, n’a jamais prétendu autre chose que d’énoncer des vérités provisoires soumises aux critiques, formulées différemment selon ses auditoires et les diverses phases de son œuvre. Steiner est devenu, on s’en réjouit, un personnage publique. A ce titre il est soumis au crible des observateurs, on sait que lui-même n’attendait pas autre chose. Mais pas plus pour lui que pour n’importe quel autre personnage, il n’est possible de le réduire à un seul moment, une seule pensée. Il est de ceux qui ont ouvert les voies de la pensée complexe qui intègre même la dimension du paradoxe.

Que doit-on défendre, alors ?

Cela ne fait aucun doute : il faut défendre des valeurs proprement humaines. Elles sont universelles : la dignité, la liberté de pensée, de croire ou ne pas croire, d’aimer, de s’exprimer, de chercher des voies inédites pour le futur des hommes et de la Terre, la liberté de s’associer avec tous ceux qui poursuivent des buts similaires, tout cela dans le respect des diversités et des lois générales.

Nous l’affirmons : l’anthroposophie dans sa source première, c’est-à-dire dans le cœur de l’homme, trouve son sens dans son lien indissociable avec ces valeurs partagées. En tant que méthode, elle invite à forger des outils par la pensée. En tant qu’impulsion vivante, elle suscite des voies d’actions ouvertes. Chaque individu peut en faire l’exercice dans une culture profonde de l’éthique.

C’est dans cet esprit que nous recommandons vivement la lecture de ces récentes publications :

www.aether.news/newsletter/lettre-daether-n23

http://steiner-waldorf.org/notre-reponse-a-linterview-de-gregoire-perra-dans-le-point-datee-du-29-04-2019/

https://www.redacteur-independant.ch/2019/07/11/limposture-gregoire-perra/